mardi 7 août 2007

Réflexions échangées entre Nelly Boutinot et Yorghos Remvikos concernant la biosurveillance

Nelly Boutinot -Vice-Présidente de la Ligue ROC- et Yorghos Remvikos, représentant de la Ligue ROC dans le Groupe 3 et Vice-Président de VIVAGORA précisent la notion de biosurveillance, à travers ce dialogue.


Nelly Boutinot : Nous demandons de concert la mise en place d’un processus permanent de mesure de l’exposition de la population à des toxiques environnementaux par le biais d’un relevé systématique de biomarqueurs, piloté par l’InVS (Institut de veille sanitaire). Il serait intéressant d'exposer les motifs.

Yorghos Remvikos: Pour atteindre un environnement respectueux de la santé il faut bien sûr instaurer des mesures de réduction des niveaux de pollution. Mais d'abord lesquelles ? Puis comment s'assurer que les mesures sont proportionnées au risque réel ? Il faut d'abord connaître la dangerosité des déterminants environnementaux (c'est le but des études toxicologiques) et leurs impacts sanitaires (études épidémiologiques). Ceci nous donne une grille de lecture, permettant de calculer le risque de développer une maladie pour un individu exposé à un niveau donné. Il est donc important de disposer d’une bonne connaissance du niveau de l'exposition à ces polluants des populations et plus précisément à l'échelle des individus car la santé concerne chacun de nous.

Nelly Boutinot : Comment peut-on procéder?

Yorghos Remvikos: La mesure de l’exposition nécessite le développement de méthodes analytiques et le choix des marqueurs, ainsi que la mise en place de stratégies de mesures d’envergure. Nous demandons la mise en œuvre d’une collecte systématique de données de biomarqueurs à l'échelle de la population française. Il s'agirait d'une étude d’imprégnation de masse, susceptible de nous renseigner sur le niveau d'exposition générale, substance par substance. Nous pourrions ainsi déterminer quelles substances pénètrent chez les Français et à quelles concentrations.


Nelly Boutinot:
Y a-t-il déjà eu des études de ce type en France?

Yorghos Remvikos: Elles ont été réservées aux sous-groupes particulièrement exposés en milieu professionnel. Cependant, précisons que du point de vue de la santé environnementale et de la quantification des impacts sanitaires, dans les pays occidentaux, nous sommes confrontés à des situations d’exposition chronique à des faibles doses, mais qui concernent de larges populations. La proportion des individus susceptibles de développer une pathologie est faible, mais comme la population exposée est importante, le nombre de cas peut être considérable. Ce sont, sur le plan méthodologique, les situations les plus difficiles à étudier.

Nelly Boutinot: A-t-on des "modèles" à l'étranger?

Yorghos Remvikos: La proposition s’inspire de l’étude conduite aux U.S.A depuis plus de dix ans par le Center of Disease Control (CDC) d'Atlanta http://www.cdc.gov/exposurereport/ (qui présente quelques similitudes avec l'Institut de veille sanitaire (InVS). Il s’agit de la plus grande étude de ce type sur le plan mondial. Des centaines de substances : métaux, HAP, PCBs, phtalates, pesticides organochlorés ou organophosphatés, sont analysés dans le sang et l'urine d'un échantillon représentatif de la population générale, tous les trois ans.

Nelly Boutinot: Serait-ce une mesure de rupture profitable à tout le monde y compris à l'Etat?

Yorghos Remvikos: La mesure ne peut être que gouvernementale mais si elle est portée par le Groupe 3 dont l'Etat est partie prenante, le travail du ministre serait de la reprendre. Elle marquerait, ce qui n'est pas rien, la volonté d’établir le meilleur état des lieux possible pour ce qui concerne l’imprégnation de la population française en polluants environnementaux. De plus, le renouvellement périodique de l'étude permettrait d’évaluer, à moyen et à long terme, les actions entreprises pour diminuer l’exposition des populations aux produits toxiques environnementaux en général mais aussi à la pollution agricole et industrielle.

Nelly Boutinot: En effet, à partir de l'état des lieux et établir ce contrôler régulier serait une mesure exemplaire en Europe. Il suffit que tous les acteurs du Grenelle en aient l'ambition pour eux, leurs proches, l'ensemble des citoyens français... et européens.

1 commentaire:

GV a dit…

Bravo. Très bonne proposition, qui apportera une plus value épidémiologique considérable.
Des choix scientifiques complexes devront être opérés : quelles molécules suivre, quels individus suivis, sur quels critères... et les dosages nombreux (et donc couteux). Mais l'enjeu mérite un tel effort.
Gaël